Anamnèse et Entretien Motivationnel
Parmi les techniques promues par les TCC, l’entretien motivationnel tient une place importante. Dans les relations thérapeutiques quotidiennes, on a rarement le temps de mettre en place un processus complexe, comme cette méthode d’entretien motivationnel, pour parvenir à l’alliance thérapeutique. Il nous a semblé cependant intéressant d’attirer l’attention sur cette méthode dont il y a beaucoup à apprendre précisément pour le quotidien, et ceci à travers deux extraits d’ouvrages dont nous donnons les références ci-dessous.
L’entretien motivationnel est déterminant parce que, tout comme en hypnose et en EMDR, il met l’accent sur la nécessité absolue d’avoir une « cible », un « objectif » thérapeutique, formulé par le patient lui-même, réaliste, à tout le moins validé et accepté par lui avant de commencer toute thérapie proprement dite.
Selon les cas, et par exemple pour suivre des patients chroniques, ou lorsque l’on doit installer avec un patient une relation thérapeutique sur la durée, il est utile de consacrer plus de temps et d’ingénierie communicationnelle à cette installation. Dans ces cas l’entretien motivationnel est particulièrement utile.
Le schéma ci-dessous présente les différentes composantes de la détermination collaborative de cet OBJECTIF ;
Voici deux extraits significatifs de l’esprit de l’entretien motivationnel, issus de :
Miller, William R.. L’entretien motivationnel – 2e éd. : Aider la personne à engager le changement (Soins et Psy). InterEditions
« – L’entretien motivationnel est un style de conversation collaboratif pour renforcer la motivation propre d’une personne et son engagement vers le changement.
– Le style général de l’EM est un style qui guide, qui se situe entre les styles « diriger » et « suivre » et incorpore des éléments de ceux-ci.
– L’ambivalence est une étape normale de la préparation au changement et un point où la personne peut rester bloquée pendant un certain temps. – Lorsque l’intervenant utilise un style directif et argumente pour le changement avec une personne ambivalente, cela fait naturellement ressortir les arguments opposés. (Confrontation)
– Les personnes ont plus de chance d’être persuadées par ce qu’elles s’entendent dire. »
(…)
« Nos services existent pour apporter un bénéfice aux personnes que nous recevons (et non l’inverse).
Les besoins de nos clients (participants, patients, usagers, bénéficiaires…) sont (ou plutôt, devraient toujours être) nos priorités.
- Le changement est essentiellement un changement par soi-même. Les services (traitements, thérapies, interventions, conseils…) facilitent les processus naturels de changement (Prochaska & Di Clémente, 1984).
- Chaque personne est l’experte de soi-même. Personne ne la connaît mieux qu’elle ne se connaît.
- Nous ne devons pas faire survenir le changement. En tout cas, nous ne pouvons le faire tout seuls.
- Nous n’avons pas à apporter toutes les bonnes idées. Il est bien possible que nous n’ayons pas les meilleures.
- Les personnes ont leurs propres capacités, motivations et ressources, qui sont vitales pour qu’un changement survienne.
- Un changement requiert donc un partenariat, une collaboration entre deux expertises.
- Il est important de comprendre le point de vue de la personne sur sa situation, ses besoins et les moyens d’y répondre.
- Le changement n’est pas un rapport de force où nous « gagnons » s’il se produit. Une conversation sur le changement doit donner plus le sentiment de danser que de lutter.
- La motivation au changement n’est pas instituée, elle est exprimée. Elle existe déjà mais doit être appelée à s’extérioriser.
- Nous ne pouvons pas combattre la liberté de choix des personnes quant à leurs comportements. Elles prennent leurs propres décisions sur ce qu’elles feront ou non, et il ne saurait y avoir d’objectif de changement sans que la personne ne l’ait adopté.» [Fin de citation]
Deuxième extrait (même source)
Quelques questions suggérées pour chacun des quatre processus d’un Entretien Motivationnel
- Engager la relation
À quel point cette personne est-elle à l’aise en me parlant ? À quel point suis-je encourageant et aidant ? Est-ce que je comprends son point de vue et ses préoccupations ? À quel point est-ce que je me sens à l’aise dans cette conversation ? Est-ce que cette conversation ressemble à une relation collaborative ?
- Focaliser
Quels objectifs de changement a réellement cette personne ? Est-ce que je souhaite d’autres changements pour cette personne ? Est-ce que nous travaillons ensemble avec un objectif commun ? Est-ce que nous avançons ensemble et pas dans des directions différentes ? Est-ce que j’ai un sentiment clair de là où nous allons ? Est-ce que cela ressemble plus à une danse qu’à une lutte ?
- Évoquer
Quelles sont ses raisons personnelles pour changer ? La réticence est-elle plutôt motivée par l’importance du changement ou par la confiance dans la capacité à changer ? Qu’est-ce que j’entends comme discours-changement ? Comme discours-maintien ? Est-ce que j’oriente trop loin ou trop vite dans une direction particulière ? Est-ce que le réflexe correcteur [1] me conduit à être celui ou celle qui argumente pour le changement ?
- Planifier
Quelle pourrait être la première étape raisonnable vers le changement ? Qu’est-ce qui aiderait cette personne à aller de l’avant ? Est-ce que je m’attache à faire évoquer plutôt qu’à prescrire un plan ? Est-ce que je fournis les informations ou conseils utiles en ayant demandé la permission ? Est-ce que je continue à avoir une curiosité tranquille sur ce qui marchera le mieux pour cette personne ?
Le schéma ci-dessous permet de comprendre le cycle de la motivation chez le patient et de situer à quel moment l’entretien motivationnel peut et doit intervenir. Modèle majeur pour les problèmes d’addiction.
Prochaska, JO, Di Clémente, CC. The transtheoretical approach: crossing traditional boundaries of therapy. Homewood, IL: Dow Jones-Irwin ; 1984. (ISBN 087094438X)
Une autre version de ce schéma est consultable sur le site de la Haute Autorité de Santé
Une dernière référence : Dumont et Stitou, Entretien Motivationnel et soins infirmiers, Dunod, 2019. Sous forme de fiches, très pratique !
Si vous souhaitez échanger avec nous sur l’entretien initial, l’anamnèse, etc…. nous en serions heureux.
[1] Réflexe correcteur : tendance du soignant à privilégier d’emblée sa solution avant tout échange.